La faunistique aquatique consiste à inventorier, identifier et analyser la répartition des espèces animales vivant dans les milieux d’eau douce, saumâtres ou marins. Afin de mieux comprendre la biodiversité aquatique et son évolution face aux pressions environnementales, les scientifiques s’appuient sur des techniques d’échantillonnage spécifiques, rigoureuses et adaptées aux différents types d’habitats (rivières, lacs, estuaires, récifs, zones profondes, etc.). Ces méthodes permettent de recueillir des données cruciales sur la composition des communautés, les densités d’espèces, les interactions écologiques et la qualité des milieux.
Objectifs et contextes de l’échantillonnage
L’échantillonnage en faunistique aquatique poursuit plusieurs objectifs :
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établir un inventaire des espèces présentes dans un site donné ;
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suivre l’évolution temporelle de la biodiversité ;
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évaluer la qualité écologique des milieux à partir d’indicateurs biologiques (bioindication) ;
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analyser les effets de pressions anthropiques comme la pollution, l’eutrophisation ou les aménagements hydrauliques ;
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fournir des données pour la gestion et la conservation de la faune aquatique.
Les stratégies d’échantillonnage varient en fonction de la nature du milieu, des espèces ciblées (invertébrés, poissons, amphibiens, etc.), des périodes de l’année et des contraintes logistiques.
Méthodes d’échantillonnage des macroinvertébrés aquatiques
Les macroinvertébrés (insectes aquatiques, crustacés, mollusques, annélides) sont très utilisés comme bioindicateurs en raison de leur sensibilité aux variations de qualité de l’eau. Les principales techniques incluent :
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L’utilisation d’un filet Surber ou d’un filet à maille fine placé sur le fond de la rivière pendant qu’on remue le substrat en amont pour capturer les organismes.
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La technique du kick sampling, qui consiste à piétiner le fond pendant un temps donné tout en plaçant un filet en aval pour recueillir les organismes dérivés.
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Le dragage ou raclage du substrat avec des instruments comme la benne Ekman pour les sédiments mous ou le filet D-frame pour les substrats durs.
Les échantillons sont ensuite triés, identifiés sous loupe binoculaire ou microscope, puis comptabilisés.
Techniques pour l’échantillonnage des poissons
L’étude des poissons nécessite des méthodes actives ou passives :
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La pêche électrique est l’une des techniques les plus répandues en eaux douces. Elle consiste à envoyer un courant électrique contrôlé pour immobiliser temporairement les poissons afin de les capturer à l’aide d’une épuisette.
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Les filets maillants ou verveux (nasses) sont posés passivement dans les zones de passage des poissons.
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Les senneurs ou sennes de plage sont utilisés pour les milieux peu profonds : un filet est déployé en arc de cercle et ramené progressivement.
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En mer, des techniques comme le chalutage, le palangrage, ou l’utilisation de caméras sous-marines complètent les observations.
Les poissons capturés sont mesurés, pesés, identifiés, parfois marqués, puis relâchés ou conservés selon les objectifs de recherche.
Échantillonnage des amphibiens aquatiques
Les amphibiens sont inventoriés principalement pendant la saison de reproduction, où ils sont plus visibles et détectables par :
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Observation directe de jour ou de nuit à l’aide de lampes frontales ;
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Écoute des chants pour repérer les mâles appelants ;
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Utilisation de pièges flottants ou de nasses placés dans les mares ou fossés ;
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Filets à main ou épuisettes dans les points d’eau peu profonds.
La collecte de pontes ou de larves permet également une identification indirecte.
Techniques non invasives : génétique environnementale et vidéo
De nouvelles méthodes permettent de compléter ou remplacer les techniques traditionnelles :
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L’ADN environnemental (ADNe) consiste à collecter un échantillon d’eau puis à analyser les fragments d’ADN relargués par les organismes. Cette approche permet de détecter des espèces rares ou discrètes, sans capture directe.
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Les caméras immergées, posées sur le fond ou fixées sur des drones sous-marins, permettent d’enregistrer la faune dans son habitat naturel sans perturber les comportements.
Contraintes et biais de l’échantillonnage
Malgré leur efficacité, toutes ces méthodes présentent des limites :
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certaines espèces sont plus facilement détectables que d’autres selon les saisons ou les conditions d’eau (température, turbidité) ;
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les méthodes peuvent être sélectives selon la taille, le comportement ou le mode de vie des espèces (benthiques, pélagiques, cryptiques…) ;
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les biais d’observation humaine ou de dérangement peuvent fausser les résultats.
D’où l’importance de combiner plusieurs techniques et de répéter les prélèvements à différentes périodes pour obtenir des données robustes et représentatives.
Intérêts pour la conservation et la gestion
Les données issues de l’échantillonnage faunistique sont indispensables pour :
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établir des cartes de répartition d’espèces menacées ;
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suivre les effets des programmes de restauration écologique ;
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alimenter les diagnostics pour les plans de gestion de bassins versants ou d’aires protégées ;
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guider les politiques publiques en matière de biodiversité aquatique.
Conclusion
L’échantillonnage en faunistique aquatique repose sur une diversité de techniques adaptées aux milieux et aux espèces ciblées. Ces méthodes, de plus en plus perfectionnées et parfois complétées par des outils non invasifs, permettent une connaissance fine de la biodiversité aquatique. Ce savoir est essentiel pour la préservation des milieux humides, des cours d’eau et des océans, face aux multiples menaces qui pèsent sur ces écosystèmes vitaux.