Effets des traitements thermiques sur les microbes alimentaires

 

Le traitement thermique est l’un des moyens les plus utilisés dans l’industrie agroalimentaire pour éliminer ou réduire la charge microbienne des aliments. Il s’agit d’un procédé fondamental pour garantir la sécurité sanitaire, prolonger la durée de conservation et améliorer la digestibilité de certains produits. Mais comment ces températures influencent-elles réellement les micro-organismes alimentaires ? Quelles sont les limites ? Et quels sont les impacts sur la qualité des aliments ?

Pourquoi traiter les aliments par la chaleur ?

Les aliments, qu’ils soient crus, transformés ou prêts à consommer, peuvent contenir une variété de micro-organismes :

  • Pathogènes : Salmonella, Listeria monocytogenes, E. coli, Clostridium, etc.

  • Altérants : levures, moisissures, bactéries lactiques indésirables

  • Bénéfiques : comme les bactéries probiotiques dans les produits fermentés

Le but du traitement thermique est de détruire ou d’inactiver les micro-organismes nuisibles tout en conservant au mieux les qualités nutritionnelles et organoleptiques.

Les principaux types de traitements thermiques

1. Pasteurisation

  • Température : 63–90 °C pendant 15 secondes à plusieurs minutes.

  • Objectif : réduire la charge microbienne (sans la stériliser totalement).

  • Exemple : lait, jus de fruits, bière, plats cuisinés réfrigérés.

  • Résultat : destruction des pathogènes non sporulés et limitation de la flore altérante.

2. Stérilisation

  • Température : ≥ 115–121 °C pendant 15 à 30 minutes.

  • Objectif : éliminer tous les micro-organismes viables, y compris les spores.

  • Exemple : conserves, plats en bocaux.

  • Résultat : produit appertisé stable à température ambiante pendant des mois.

3. UHT (Ultra Haute Température)

  • Température : environ 135–150 °C pendant 1 à 4 secondes.

  • Objectif : destruction microbienne tout en préservant les qualités nutritionnelles.

  • Exemple : lait UHT, crème liquide.

  • Avantage : durée de conservation longue sans réfrigération.

4. Blanchiment

  • Température : 80–100 °C pendant quelques secondes à minutes.

  • Objectif : inactiver les enzymes et réduire partiellement la charge microbienne.

  • Exemple : légumes surgelés avant congélation.

  • Résultat : stabilisation avant traitement ultérieur (congélation, séchage…).

Effets des traitements thermiques sur les microbes alimentaires

1. Destruction des cellules végétatives

  • Les bactéries non sporulées sont sensibles à la chaleur.

  • Exemple : Salmonella, Listeria, Campylobacter → détruites dès 70–75 °C.

2. Inactivation des spores bactériennes

  • Les spores de Clostridium botulinum, Bacillus cereus ou Clostridium perfringens sont très résistantes.

  • Nécessitent des températures > 115 °C pour être totalement détruites.

  • D'où l’intérêt de la stérilisation ou du traitement sous pression (autoclavage).

3. Altération de la structure microbienne

  • La chaleur dénature les protéines membranaires, désorganise l’ADN et bloque les systèmes enzymatiques des microbes.

  • Ces modifications rendent la cellule non viable.

4. Effet cumulatif du temps et de la température

  • Plus la température est élevée, plus le temps nécessaire pour tuer un microbe est court.

  • La cinétique de destruction suit souvent une loi logarithmique : 90 % des bactéries sont détruites à chaque intervalle de temps donné (valeur D).

5. Facteurs influençant l’efficacité thermique

  • Type de microbe (certaines espèces sont plus résistantes que d’autres)

  • Concentration microbienne initiale

  • Nature de l’aliment : eau, matières grasses, pH, texture influencent la transmission de chaleur

  • Conditionnement (aliments en vrac, sous vide, en conserve)

Limites des traitements thermiques

1. Dégradation nutritionnelle

  • Perte de vitamines thermosensibles (C, B1, folates)

  • Modification de certains acides aminés et enzymes

2. Altération des qualités organoleptiques

  • Changement de goût, de couleur, de texture

  • Par exemple, un lait UHT est perçu comme "cuit" par rapport à un lait pasteurisé

3. Survie de spores ou microbes thermorésistants

  • Si le traitement est mal appliqué (température ou durée insuffisante)

  • Risque de germination des spores après traitement si les conditions de stockage sont favorables

Alternatives et complémentarités

Pour éviter les effets négatifs des fortes chaleurs, plusieurs techniques associées ou alternatives émergent :

1. Traitements combinés (Hurdle technology)

  • Associer température + pH + sel + atmosphère modifiée pour réduire la charge microbienne sans dégrader la qualité

2. Pasteurisation à haute pression (HPP)

  • Appliquer des pressions très élevées (jusqu’à 6 000 bars) à température modérée

  • Inactive les microbes sans cuisson → conserve les qualités sensorielles

3. Micro-ondes et infrarouges

  • Chaleur pénétrante ou ciblée

  • Rapidité et efficacité variable selon la matrice alimentaire

Importance pour la sécurité alimentaire

Les traitements thermiques bien maîtrisés permettent de :

  • Prévenir les toxi-infections alimentaires (salmonellose, listériose, botulisme…)

  • Assurer la conformité réglementaire (normes microbiologiques européennes)

  • Allonger la durée de conservation sans additifs chimiques

  • Réduire les pertes alimentaires liées à la contamination microbienne

Conclusion

Le traitement thermique des aliments reste une barrière microbiologique essentielle pour assurer la sécurité sanitaire des produits tout en garantissant leur stabilité et leur acceptabilité. Il agit en détruisant les bactéries, levures et moisissures, mais nécessite une application rigoureuse et adaptée à chaque produit. Grâce à l’innovation technologique, les procédés thermiques évoluent vers plus de précision et de respect de la qualité nutritionnelle.

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