Tiques et maladies vectorielles chez les chiens

 Les tiques sont des arthropodes hématophages redoutés dans le monde vétérinaire, non seulement en raison de leur capacité à parasiter les chiens, mais surtout parce qu’elles sont vectrices de nombreuses maladies potentiellement graves. Ces maladies vectorielles canines, parfois appelées "maladies transmises par les tiques", constituent un enjeu majeur de santé animale, notamment dans les régions tempérées et méditerranéennes. Une bonne connaissance des tiques, des maladies qu’elles transmettent, ainsi que des stratégies de prévention et de traitement, est essentielle pour protéger nos compagnons à quatre pattes.

Les tiques : caractéristiques et cycle de vie

Les tiques appartiennent à la classe des arachnides, comme les acariens et les araignées. Chez le chien, les espèces les plus fréquentes sont Rhipicephalus sanguineus (tique brune du chien), Ixodes ricinus (tique des forêts), et Dermacentor reticulatus. Ces tiques passent par quatre stades de développement : œuf, larve, nymphe, et adulte. À chaque stade (sauf l’œuf), elles ont besoin d’un repas de sang pour évoluer.

Les tiques se fixent sur le chien grâce à leur rostre, injectent une salive anticoagulante et immunomodulatrice, et peuvent transmettre des agents pathogènes après plusieurs heures de fixation. Le risque est donc directement lié à la durée d’attachement de la tique à l’hôte.

Les principales maladies vectorielles transmises par les tiques

Certaines tiques sont porteuses de micro-organismes pathogènes (bactéries, protozoaires, virus) qu’elles peuvent inoculer lors du repas sanguin. Les maladies vectorielles les plus fréquentes chez le chien sont :

1. La piroplasmose (ou babésiose canine)

Causée par le protozoaire Babesia canis (ou Babesia vogeli), transmis par la tique Dermacentor reticulatus ou Rhipicephalus sanguineus. Ce parasite infecte les globules rouges, provoquant leur destruction.

Symptômes : fièvre élevée, abattement, urine foncée (coloration brun-rouge), pâleur des muqueuses, anorexie. Sans traitement rapide, elle peut être mortelle.

Traitement : injection d’antiprotozoaires spécifiques (imidocarbe), perfusions, anti-inflammatoires. Une prévention par antiparasitaires externes est essentielle.

2. L’ehrlichiose

Transmise par Rhipicephalus sanguineus, cette maladie est due à Ehrlichia canis, une bactérie intracellulaire qui affecte les globules blancs.

Symptômes : fièvre, épistaxis (saignements du nez), amaigrissement, troubles de la coagulation, douleurs articulaires, anémie. Elle peut évoluer en forme chronique avec atteinte de la moelle osseuse.

Traitement : antibiothérapie prolongée (notamment doxycycline) et traitement symptomatique.

3. L’anaplasmose

Causée par Anaplasma phagocytophilum (transmis par Ixodes ricinus) ou Anaplasma platys (transmis par Rhipicephalus sanguineus). Ce sont des bactéries qui infectent les plaquettes ou les globules blancs.

Symptômes : fièvre, boiterie, douleurs musculaires, troubles de la coagulation, perte d’appétit. Elle est souvent moins grave que l’ehrlichiose mais reste préoccupante.

Traitement : doxycycline pendant plusieurs semaines, associée à des soins de soutien.

4. La maladie de Lyme (borréliose de Lyme)

Transmise par la tique Ixodes ricinus, elle est causée par la bactérie Borrelia burgdorferi. Bien que plus fréquente chez l’homme, elle touche aussi les chiens, en particulier ceux vivant dans des zones boisées et humides.

Symptômes : fièvre intermittente, douleurs articulaires, boiterie changeante, fatigue chronique. Dans certains cas rares, une néphrite (atteinte rénale grave) peut apparaître.

Traitement : antibiotiques (doxycycline), anti-inflammatoires, et traitement des complications rénales si nécessaire.

5. L’hépatozoonose

Transmise par l’ingestion de tiques infectées (et non par morsure), elle est causée par Hepatozoon canis. Présente surtout dans le sud de l’Europe et en Afrique du Nord.

Symptômes : fatigue, douleurs musculaires, fièvre chronique, perte de poids. Elle est difficile à diagnostiquer et nécessite souvent un traitement de longue durée.

Prévention des maladies à tiques chez le chien

La prévention repose sur plusieurs axes complémentaires visant à limiter l’exposition du chien aux tiques et à intervenir rapidement en cas de morsure.

1. Traitements antiparasitaires externes

Il existe plusieurs formulations efficaces :

Pipettes spot-on : Appliquées sur la peau, elles repoussent et tuent les tiques pendant plusieurs semaines.
Colliers insecticides : Offrent une protection de plusieurs mois (jusqu’à 8 mois pour certains produits).
Comprimés oraux : Agissent de l’intérieur, tuent les tiques après qu’elles aient commencé à se nourrir (protection de 1 à 3 mois selon la molécule).
Sprays répulsifs : Utiles pour une protection ponctuelle, mais moins durables.

Le choix du produit dépend du mode de vie du chien, de la région géographique, de la fréquence d’exposition, et des préférences du propriétaire. Il est important de respecter les délais de réapplication pour garantir une protection continue.

2. Inspection régulière du pelage

Après chaque promenade en zone à risque (forêts, broussailles, herbes hautes), il est recommandé de :

– Brosser le chien minutieusement
– Inspecter les zones préférées des tiques : oreilles, cou, aisselles, entre les doigts, ventre
– Retirer immédiatement toute tique avec un crochet tire-tique ou une pince fine, sans utiliser d’alcool ou de produits irritants

Plus la tique est enlevée tôt, plus le risque de transmission de maladie est réduit.

3. Vaccination

Il existe un vaccin contre la piroplasmose (Babesia canis) en Europe, recommandé pour les chiens très exposés. Bien qu’il n'empêche pas complètement l’infection, il réduit la gravité des symptômes.

Un vaccin contre la maladie de Lyme est également disponible dans certaines régions. Il doit être accompagné d’une protection anti-tiques pour être efficace.

4. Entretien de l’environnement

Limiter la présence de tiques dans l’environnement du chien est également important :

– Tondre les herbes hautes dans le jardin
– Éviter l’accumulation de feuilles mortes et d’humidité
– Traiter les niches, paniers, et zones de repos avec des produits acaricides

5. Surveillance vétérinaire

Un chien ayant été piqué par plusieurs tiques ou montrant des signes suspects (fatigue, boiterie, fièvre, saignements) doit être examiné rapidement. Des analyses de sang spécifiques permettent de détecter les principales maladies vectorielles.

Conclusion

Les tiques représentent une menace sérieuse pour la santé des chiens, non seulement par leur action parasitaire directe, mais surtout par les maladies qu’elles peuvent transmettre. La piroplasmose, l’ehrlichiose, l’anaplasmose, la maladie de Lyme ou encore l’hépatozoonose sont autant d’affections parfois graves, voire mortelles. Une prévention rigoureuse, incluant l’utilisation de traitements antiparasitaires, des inspections régulières et un suivi vétérinaire, est indispensable pour protéger efficacement nos compagnons canins.

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