Les maladies auto-immunes sont des affections où le système immunitaire attaque les cellules et tissus sains de l'organisme, comme s'ils étaient des agents pathogènes. Elles incluent des conditions comme la sclérose en plaques, le lupus, la polyarthrite rhumatoïde, et la maladie de Crohn. Si ces maladies étaient relativement rares il y a quelques décennies, leur prévalence a considérablement augmenté au cours des dernières années. Un des facteurs souvent associés à cette augmentation est la survenue d'infections virales et bactériennes, qui peuvent agir comme déclencheurs de la réponse auto-immune.
1. Mécanismes de base de l'immunité et des maladies auto-immunes
Normalement, le système immunitaire protège l'organisme contre les infections en identifiant et en éliminant les agents pathogènes, tels que les virus et les bactéries. Cependant, lorsqu'il y a une défaillance du mécanisme de régulation, le système immunitaire peut se retourner contre les cellules du corps, provoquant des maladies auto-immunes. Cette dysfonctionnement peut être causé par des facteurs génétiques, mais aussi par des facteurs environnementaux, dont les infections.
2. Le rôle des infections dans l'apparition des maladies auto-immunes
Certaines infections, en particulier les infections virales, sont soupçonnées de déclencher ou d'aggraver les maladies auto-immunes. Voici quelques mécanismes par lesquels les infections peuvent jouer ce rôle :
a) Mimétisme moléculaire
Le mimétisme moléculaire est un phénomène par lequel une infection déclenche une réponse immunitaire qui attaque non seulement le pathogène, mais aussi des molécules ou des structures similaires présentes dans les cellules du corps. En d'autres termes, le système immunitaire peut se tromper et attaquer des cellules humaines, car certaines de leurs protéines ressemblent à celles du virus ou de la bactérie responsables de l'infection.
Un exemple bien documenté est l'infection par le virus Epstein-Barr (EBV), qui est souvent associée au déclenchement de maladies comme la sclérose en plaques. Le virus EBV porte des protéines qui ressemblent à des protéines présentes dans les cellules nerveuses humaines, ce qui pourrait amener le système immunitaire à attaquer à la fois le virus et les cellules nerveuses, provoquant ainsi des lésions.
b) Activation inappropriée du système immunitaire
Les infections peuvent perturber l'équilibre de la réponse immunitaire, en particulier en augmentant la production de certaines molécules inflammatoires, appelées cytokines, qui régulent la réponse du système immunitaire. Lors de certaines infections, la production excessive de cytokines peut entraîner une réponse inflammatoire incontrôlée, ce qui est particulièrement problématique pour les personnes génétiquement prédisposées à des maladies auto-immunes.
Des infections comme la grippe ou certaines infections bactériennes peuvent être responsables de l'activation excessive des lymphocytes T et B, entraînant une réaction immunitaire systémique. Cette activation incontrôlée peut potentiellement conduire à la formation de complexes immuns (combinaisons d'anticorps et d'antigènes), qui se déposent dans les tissus corporels et provoquent des lésions, caractéristiques des maladies auto-immunes.
c) Perturbation du microbiome et réponse immunitaire altérée
Les infections, en particulier les infections bactériennes, peuvent également affecter le microbiome intestinal, un ensemble de milliards de micro-organismes qui vivent dans notre tractus gastro-intestinal. Le microbiome joue un rôle essentiel dans le régulation du système immunitaire. Une perturbation du microbiome (dysbiose) peut entraîner une activation du système immunitaire de manière anormale, rendant le corps plus vulnérable aux maladies auto-immunes.
Les infections intestinale, comme celles causées par la salmonelle ou des infections virales intestinales, ont été associées à des maladies auto-immunes comme la maladie de Crohn et la colite ulcéreuse, car elles peuvent altérer l'équilibre du microbiome et stimuler des réponses immunitaires inappropriées.
3. Les infections spécifiques et leur lien avec les maladies auto-immunes
Certaines infections sont particulièrement connues pour leur rôle dans le déclenchement de maladies auto-immunes. Voici quelques exemples :
Le virus Epstein-Barr (EBV) : Ce virus, responsable de la mononucléose infectieuse, est lié à un certain nombre de maladies auto-immunes, y compris la sclérose en plaques, le lupus, et la polyarthrite rhumatoïde. L'EBV semble jouer un rôle dans l'activation des lymphocytes B, ce qui pourrait entraîner la production d'anticorps qui attaquent les tissus du corps.
Le streptocoque : Certaines infections à streptocoques, notamment la scarlatine, peuvent déclencher une maladie auto-immune appelée fièvre rhumatismale, où le système immunitaire attaque les valvules cardiaques, les articulations et d'autres tissus.
Le cytomégalovirus (CMV) et l'hépatite C : Ces virus ont été associés à des troubles auto-immuns tels que le lupus et la polyarthrite rhumatoïde, bien que les mécanismes exacts restent mal compris.
4. Facteurs de prédisposition génétique et environnementale
Le lien entre les infections et les maladies auto-immunes n'est pas uniquement attribuable à l'infection elle-même. En réalité, il existe souvent une interaction complexe entre des facteurs génétiques et environnementaux. Les personnes ayant des génétique prédisposante à des maladies auto-immunes sont plus susceptibles de développer ces affections après une infection. Par exemple, des variations dans les gènes des récepteurs immunitaires peuvent rendre certains individus plus vulnérables aux réponses auto-immunes après une infection.
5. Conclusion : Un lien complexe entre infections et maladies auto-immunes
Bien que les infections ne soient pas la seule cause des maladies auto-immunes, elles peuvent agir comme des déclencheurs dans certaines conditions. Le mécanisme par lequel les infections entraînent une activation immunitaire anormale est encore un domaine de recherche intense. Le mimétisme moléculaire, la perturbation du microbiome, et l'activation excessive du système immunitaire sont tous des processus qui contribuent à cette relation complexe. Comprendre ces mécanismes peut nous aider à mieux prévenir et traiter les maladies auto-immunes, en particulier pour les personnes à risque.